Les crêtes découpées du Jura suisse

Les vacances de la Toussaint sont les bienvenues dans ce premier trimestre de lycée dense en préparatifs, réunions, corrections, etc.

Cette année j’ai encore décidé de ne pas partir trop loin, moins de quatre heures de voiture de la maison. Se dépayser n’exige pas forcément de longues distances et marcher reste mon moyen le plus efficace pour me recentrer et me déconnecter des tracas du quotidien.

Jesper et Julie m’ont accompagnée pour cette escapade de cinq jours.

Samedi 29 octobre – Jour 1

J’avais réservé un gîte à la Chaux-du-Milieu en Suisse, dans un coin surnommé « La Petite Sibérie ». Le gîte est aménagé dans une ancienne ferme. Il est immense, tout en bois, rustique et préservé. Nous avions chacun et chacune notre chambre. Seul bémol, il est situé au cœur d’une région d’exploitation des vaches et nous ne pouvions pas ouvrir les fenêtre sans entendre le son de leur cloche, monotonie glaçante d’un outil de torture banalisé pour ces êtres. Outil obsolète qui les rend sourdes et n’est justifié par rien. L’espace est cloisonné en prisons à ciel ouvert, elles ne peuvent échapper à leur mort programmée.

Nous sommes arrivées le samedi 29 octobre en milieu d’après-midi. Le temps de nous installer et de prendre connaissance de notre lieu de vie pour cinq jours fut rapide. Nous sommes ensuite parties dîner à Neuchâtel, la ville importante la plus proche, à 30 mn de la maison.

Jesper avait repéré dans l’application « Happy Cow » LE restaurant végane de la cité : Eateco.

Comme nous étions un peu en avance, nous en avons profité pour monter sur les hauteurs de la ville afin de contempler le lac depuis la roche de l’Ermitage qui offre aussi un point de vue exceptionnel sur les Alpes.

Le restaurant végane fut une agréable découverte, le dîner était succulent et l’ambiance conviviale. Je me suis régalée avec un risotto complet à la courge et aux noix accompagné d’une salade de carottes à la sauce amande et de farinata de pois chiche.

Nous sommes retournées à notre gîte de nuit, croisant une multitude d’yeux brillants au détour des virages, roulant le plus lentement possible afin de préserver cette vie nocturne exceptionnelle.

Dimanche 30 octobre – Jour 2

Ma nuit fut courte. Réveillée à 3h30, j’ai eu le temps de peaufiner quelques randonnées pour le séjour.

Nous sommes parties tôt à la découverte du grand canyon suisse, le point touristique à ne pas rater de la région : le Creux-du-Van, 15 km² de nature protégée où s’épanouissent bouquetins, chamois, chevreuils, lynx et grand tétras. Les températures étaient quasi estivales. Nous avons fait un circuit de 11,5 km et de 646 m de dénivelé avec une pente abrupte. Les pentes escarpées sont le lot du Jura constitué de blocs calcaires massifs et carrés.

Dès notre montée, nous avons croisé deux puissants bouquetins qui mangeaient tranquillement sur le sentier. Nous avons donc coupé à flanc de montagne afin de ne pas les déranger. C’est la première fois que je croisais cette impressionnante chèvre sauvage, peu farouche.

Arrivées au sommet de la pente, le panorama est impressionnant. Les couches de calcaire qui forment l’extraordinaire cirque rocheux du Creux-du-Van ont été déposées par une mer primitive il y a près de 200 millions d’années. Le glacier, par alternances de gel et de dégel, puis les ruisseaux ont sculpté un spectaculaire amphithéâtre, particularité géologique typique du plissement de la chaîne du Jura.

Le sentier qui longe le cirque est balisé et étroit afin de préserver la flore fragile des lieux. Nous sommes montées jusqu’à la Croix du Soliat à 1464 m d’altitude offrant un point de vue exceptionnel sur les Alpes.

Nous avons aussi croisé un troupeau de chamois, qui se déplaçait en escaladant tant bien que mal les barbelés qui enferment ce paysage pour les besoins non vitaux de la pratique arriérée de l’élevage.

D’ailleurs, les éleveurs ont placé régulièrement des panneaux hypocrites disant que les « bovins entretiennent le paysage ». Panneaux installés parfois quelques mètres après ceux rappelant qu’il faut préserver la flore sauvage ! Il semblerait que les vaches suisses sachent faire la différence dans les plantes qu’elles vont brouter. Au-delà de cette fumisterie, la nature n’a pas besoin d’être façonnée par des bovins, de plus ces prisons bloquent et limitent la circulations des autres êtres qui y vivent. Les champs infinis de pâtures n’ont aucun lieu d’exister et n’embellissent en rien le paysage, bien au contraire.

Nous sommes redescendues tranquillement par un chemin moins escarpé pour rejoindre le parking où nous étions garées près de la Ferme Robert.

En rentrant au gîte, Julie et moi nous sommes accordées une parenthèse danse, l’espace immense et ouvert de notre habitacle s’y prête parfaitement.

Lundi 31 octobre – Jour 3

Aujourd’hui c’est la découverte des Gorges de l’Areuse.

« L’Areuse, habituellement paisible, s’écoule avec fracas dans les gorges de l’Areuse, longues de 11 km, situées entre Noiraigue et Boudry dans le canton de Neuchâtel. Un magnifique sentier de randonnée longe le lit de la rivière, par endroits tranquille et à d’autres tumultueuse. Le sentier emprunte des ponts de pierre, des passerelles et des escaliers, traverse des étranglements rocheux et longe des parois rocheuses remarquablement abruptes. »

Ces propos recopiés du site mis en lien expriment parfaitement l’ambiance du parcours du jour. Les températures ont chuté et nous sommes parties sous un ciel gris et chargé d’humidité. Nous avons longé la voie ferrée sur deux kilomètres, l’Areuse suit également cette voie avant de bifurquer vers les falaises qui vont l’encercler. Le spectacle au « Saut du Brot » et son vieux pont de pierre très romantique est impressionnant. Par contre, l’essentiel de la randonnée se fait sur des sentiers goudronnés ce qui est moins agréable.

En fin de journée, nous sommes parties découvrir la petite cité de Neuchâtel et les rives de son lac. C’était Halloween et les maisons s’étaient habillées de décors macabres. Nous sommes retournées dîner à Eateco pour l’occasion.

Mardi 1er novembre – Jour 4

La météo annonçait des torrents de pluie dans la nuit et en matinée. Le paysage des prisons à ciel ouvert s’est davantage appesanti sous le crachin qui tombait. Le gris noyait le vert. Nous avions décidé de découvrir l’autre lieu vegane de la région : la Crème renversante se situant à la Chaux-de-Fonds. C’est un bar à chocolat qui propose aussi des petits plats salés le midi.

Des cieux plus calmes étaient prévus pour la fin de matinée. Nous avons décidé de faire une randonnée sur les hauteurs de la Chaux-de-Fonds mais la pluie ne s’est pas calmée et le paysage était noyé d’eau et de brume. Nous avons traversé une infinité de champs clos où de pauvres vaches mugissaient à fendre l’âme. Le point de vue était totalement bouché. Nous avons écourté cette randonnée pour aller nous réconforter dans un lieu chaleureux.

La Crème renversante nous a proposé une succulente tarte salée sans gluten ainsi que de savoureux desserts. Nous avons fini par déguster un délicieux et immense chocolat viennois chaud.

Rentrées tôt et repues, nous avons fini la journée devant un film léger, profitant de ce temps de repos pour nous ressourcer.

Mercredi 2 novembre – Jour 5

Pour cette dernière journée, nous sommes parties à la découverte des Aiguilles de Baulmes, au départ de Ste Croix, à trente minutes en voiture du gîte. Elles forment un ensemble de crêts dont le point le plus élevé culmine à 1 558 m d’altitude. D’ailleurs ce point le plus élevé était noyé dans une mer de nuages au départ. La montée fut rude (40% par endroit), presque à flanc de falaise entre rocailles et racines glissantes, terre gorgée d’eau des dernières pluies.

La ligne de crête s’étend sur 4 km et la vue s’est dégagée peu à peu, offrant des échappées incroyables jusqu’au lac Léman et sur les Alpes encore baignées de nuages cotonneux.

C’est une très belle randonnée aux vues toutes plus surprenantes les unes que les autres. Le versant nord abrupt est couvert d’une hêtraie-sapinière. Le versant sud est constitué par une falaise calcaire avec des ourlets de prairies et prés-bois. Une réserve forestière de 106 hectares couvre le sommet du crêt. Cet espace est bien moins fréquenté que le Creux-du-Van et d’autant plus appréciable.

Les températures ont bien baissé depuis le 1er jour et sont plus de saison. La neige est annoncée pour le week-end mais nous repartons demain tôt.

Un autre monde est possible #stopElevage

Hormis l’élevage omniprésent, pesant, les sommets restent à peu près des lieux où nous pouvons nous déconnecter de notre humanité assassine. Et puis, notre entente fut chouette pendant cette pause de cinq jours. D’ailleurs, j’ai fait le choix d’utiliser le féminin pluriel dans mes accords puisque nous étions deux filles et un garçon.

A tous les mangeurs et mangeuses de cailloux 😉 LOVE

Toute progression passe par un changement de regard sur les normes.

4 réflexions sur « Les crêtes découpées du Jura suisse »

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